Romain Gary - Chien blanc
"C'est assez terrible, d'aimer les bêtes.
Lorsque vous voyez dans un chien un être humain,
vous ne pouvez pas vous empêcher de voir un chien dans l'homme et de l'aimer."
J'ai terminé ma lecture de "Chien blanc", de Romain Gary.
Je l'avais déjà lu il y a de ça 25 années : je l'ai retrouvé, intact, et, personnellement, je le classerais aujourd'hui comme hier parmi les romans les plus marquants de Romain Gary. Peut-être parce qu'il est autobiographique, et que j'ai tant de plaisir à retrouver cet auteur, frère à mon âme.
1968, année des plus sombres aux Etats-Unis.
1968, c'est, outre-Atlantique, l'apogée du racisme, la mort de Martin Luther King, la guerre au Vietnam. Romain Gary y partage alors sa vie avec la jeune actrice Jean Seberg.
Un soir pluvieux de février, Sandy, le chien de la maison rentre d'une de ses virées nocturne accompagné d'un berger allemand, vraisemblablement perdu :
"Je fis entrer mon salopard, mais le berger allemand ne partait pas, et il pleuvait si dur que son poil mouillé et collé le faisait ressembler à un phoque. Il remuait la queue, les oreilles dressées, l'oeil pétillant, vif, avec cette attention intense des chiens qui guettent un geste familier ou un ordre. Il attendait clairement une invitation, revendiquant ce droit d'asile qui est inscrit depuis toujours dans les rapports des hommes avec leurs compagnons d'infortune. Je le priai d'entrer."
Ce chien "Batka" s'avère être si intelligent, si doux avec tous que l'auteur et sa compagne le prennent en affection jusqu'au jour où...
"j'entendis soudain du côté de la piscine un long rugissement, suivi de ces aboiements saccadés, rapides et rageurs par lesquels les chiens signalent à la fois la présence d'un intrus et l'imminence du combat qu'ils entendent lui livrer dans la seconde qui va suivre (...)
De l'autre côté de la grille se tenait un employé noir venu contrôler le filtre de la piscine, et Batka se jetait contre le portail, l'écume à la gueule, dans un paroxysme de haine à ce point effrayant que mon brave Sandy avait rampé en geignant sous un buisson et s'était transformé en descente de lit."
Batka, "chien blanc", chien dressé par les blancs contre les noirs...
J'ai aimé :
La tendre présence de Jean Seberg, jeune, douce, belle, engagé dans le combat anti-raciste au côté des noirs ;
J'ai aimé :
L'humanité profonde de Romain Gary ;
Son oeil lucide et teinté d'humour sur toutes choses et personnes, lui-même compris ;
Son amour pour les animaux ;
Son écriture directe à vous toucher...
(Ecrit le 10/01/2011)
Romain Gary et Jean Seberg